vase clos

vase clos

 

tout bouge et tout est immobile

dehors tout semble très normal

des jambes marchent dans la ville

celles des femmes me font mal

 

ailleurs dans un couloir sordide

des vieux sèchent à petits pas

les jours sont longs le cœur solide

la mort non plus ne viendra pas

 

écrire encore est un réflexe

ce soir il y aura ton sexe

et peu de gestes superflus

 

voyant rouge sur l’imprimante

la comédie est déprimante

même les mots n’en peuvent plus

midi centre-ville

midi centre-ville

 

la nuit ne sert à rien

et le corps est sordide

il reste au quotidien

cette impression de vide

 

comme une odeur de fruit

pourri de viande rance

la radio fait du bruit

sans casser le silence

 

je regarde au dehors

les gens ne sont pas morts

et leurs jambes s'agitent

 

ils absorbent des mots

du tabac des journaux

et des cornets de frites

état des lieux

état des lieux

 

un peu de crasse et quelques trous

de la poussière au bord des plinthes

voilà ce qu'il reste de nous

et du train-train de nos étreintes

 

planté dans cet appartement

qui sent déjà l'oubli des choses

je goûte au charme ébouriffant

du vide et des métamorphoses

 

c'était la fin d'après-midi

il faisait lourd et je t'ai dit

nous ne vieillirons pas ensemble

 

aujourd'hui tout m'est étranger

la rue déserte me ressemble

les joints jaunis sont à changer

sahara occidental

sahara occidental

 

et le vide à nouveau

ce présent sans présence

voilà ce que me vaut

novembre qui s'avance

 

il fait un temps d'été

j'existe mais sans être

sans rien avoir été

sans désirer connaître

 

à ce point du parcours

ni la joie ni les jours

ni le vent ni la vague

 

à peine spectateur

j'ai le sentiment vague

d'incarner une erreur

bar de l'hôtel

bar de l'hôtel

 

un couple sort de l’ascenseur

j’ai froid il faudrait que je parte

elle a des taches de rousseur

de loin je l’espérais moins tarte

 

ils vont s’asseoir l’amour est mort

et lui dégaine son portable

il parle fort beaucoup trop fort

ça devient vite insupportable

 

ils sont foutus et je m’en fous

des fois je me souviens de nous

de nos projets de nos promesses

 

la serveuse est là pour l’été

il pleut je commence à trembler

elle non plus n’a pas de fesses

 

parus dans le n° 25 (octobre 2025) de la revue LE CAFARD HERETIQUE


comptine

comptine

 

princesse des petits papous

vous êtes moche

vous êtes moche

princesse des petits papous

vous êtes moche

comme un pou

 

c’est ce qu’on dit mais je m’en fous

moi je vous aime

moi je vous aime

c’est ce qu’on dit mais je m’en fous

moi je vous aime

comme un fou

 

paru dans le n° 37 (septembre 2025) de la revue CAIRNS


recto

recto

 

reviens donc insolente envahir mon destin

à ton fol appétit je me donne en pâture

fais de moi ton repas de moi ta nourriture

à nouveau je veux être au menu du festin

 

préférant à leurs jeux ton céleste intestin

sa puanteur au fond même sa pourriture

à l’absence de toi maudite créature

je réclame ton souffle intime et clandestin

 

accepte mon présent femelle inassouvie

n’était-ce pas celui qui te faisait envie

entr’ouvre ton désir si j’ose euphémiser

 

laisse-moi lentement patauger dans l’ordure

retrouver ce plaisir à m’en gargariser

et vomir en priant pour que le moment dure

 

paru dans le n° 58 (septembre 2025) du fanzine littéraire BIGORNETTE


citron chantilly

citron chantilly

 

dans la neige et le vent glacé

un soir à sauxillanges

devant l'église où sont les anges

et le jésus blessé

 

ne trouvant rien de mieux à faire

en jaune sur le blanc

j'ai composé d'un jet tremblant

ce chef d'oeuvre éphémère

 

ici pissa notre bon vieux

le jour de la saint-chose

mignonne allez voir s'il arrose

et la terre et les cieux

 

paru (août 2025) sur le site de LA REVUE INUTILE


magma man

magma man

 

on a semé partout

des règles de grammaire

du sirop pour la toux

et des implants mammaires

 

on a fait s’accoupler

des bons dieux en plastique

au refrain des couplets

au pas des gymnastiques

 

mais le four a fondu

les subjonctifs ont dû

sauter de la bagnole

 

et comme on le craignait

la soupe a désormais

un goût de merde molle

foire du trône

foire du trône

 

la mamelle un peu molle

et la mort au poumon

nous vivons à la colle

dans un cirque à la con

 

cancer et camisole

comme unique horizon

d’un moulin sans parole

qui ne tourne pas rond

 

métros des métropoles

bercés par le flonflon

des folles farandoles

 

à deux nous regardons

notre vie qui s’envole

et nos jours qui s’en vont

la dolce vita

la dolce vita

 

dimanche après-midi

la zone industrielle

nos restes refroidis

qui battent la semelle

 

et cet ennui blafard

en guise d'aventure

il est déjà si tard

la fin déjà si sûre

 

un monde à petit prix

forcément le mépris

et le refrain des phrases

 

le vide en attendant

le bouquet lancinant

des longues métastases

infiltrés

infiltrés

 

nitrates et phosphates

qu’ils sortent l’air hautain

en costume cravate

d’une usine à zinzins

 

ou pour les plus modestes

du cul des intestins

en espérant la sieste

et la fosse à purin

 

nitrates et phosphates

partent à quatre pattes

vers la mer sauront-ils

 

se fondre dans la foule

des algues et des moules

et des poisons d’avril

anna 2.0

anna 2.0

 

train pourri pour paris

quinze ans peut-être seize

mon cœur sous le ciel gris

mon cul entre deux chaises

 

tout ça n’existe plus

pernety montparnasse

nos corps à corps perdus

n’ont pas laissé de trace

 

aujourd’hui d’autres gens

s’y croisent en cherchant

l’âme sœur et sans doute

 

certains sont amoureux

je suis navré pour eux

mais ça comme ils s’en foutent

extra ball

extra ball

 

l’été ferme boutique

les cons sont déjà loin

seul un sac en plastique

tourne autour du rond-point

 

oubliés sur le sable

il reste quelques vieux

et des masques jetables

dans le même état qu’eux

 

je regagne ma chambre

le soleil de septembre

ne réchauffe plus rien

 

la voilà l’aventure

tous ces jours qu’on endure

et l’hiver qui revient

 

parus dans le n° 14 (juin 2025) de la revue PLACE DE LA SORBONNE


gueule de bois

gueule de bois

 

c’est un vieil arbre sec

à la fin de l’automne

plus de nid plus de bec

plus d’ombre qui bourdonne

 

sentant le vent venir

comme tant avant elle

il a laissé partir

sa feuille la plus belle

 

et le voilà tout nu

tout seul et tout tordu

aux portes de l’asile

 

encombré de ses bras

blotti dans l’embarras

des êtres inutiles

 

paru dans le n° 33 (juin 2025) de la revue en ligne SQUEEZE


guerre civile

guerre civile

 

j’ai poussé la porte

et je suis entré

la femme était morte

et l’homme enterré

 

j’ai donné l’alerte

je suis ressorti

dans la rue déserte

un chat m’a souri

 

j’ai repris la route

au matin sans doute

ils auront ma peau

 

sanglots à la pelle

la femme était belle

et l’homme en lambeaux

 

paru dans le n° 1 (avril 2025) de la revue TEXT(URE)


défaite place de la victoire

défaite place de la victoire

 

clermont-ferrand la ville est grise

je pense à toi je pense à nous

à cet instant qui s’éternise

entre amertume et caoutchouc

 

les journaux parlent de la guerre

en palestine et d’attentats

dans les cafés les gens digèrent

je m’entête et je t’attends là

 

pourtant de flèche en cathédrale

mon arc-en-ciel se fait la malle

sur les pavés de haut en bas

 

colin-maillard et pigeon vole

des cris d’enfants des cas d’école

je sais que tu ne viendras pas

 

paru (malheureusement déstructuré) dans le n° 2 (février 2025) de la revue SPIRLA


granitique épitaphe

granitique épitaphe

 

fixant le bord occidental

d’une planète plutôt plate

il suivait un soleil en mal

d’amour et de ciel écarlate

 

fasciné déjà tout enfant

il répétait en boucle blonde

là-bas tu sais c’est différent

c’est le début du bout du monde

 

il n’a rien fait comme les gens

tourné toujours vers le couchant

où s’éteignait sa bonne étoile

 

ainsi fut mis en terre ernest

qui n’était au vent de ses voiles

peut-être pas le plus à l’ouest

 

paru dans le n° 56 (janvier 2025) du fanzine littéraire BIGORNETTE


amicalement vôtre

amicalement vôtre

 

chacun sur son quant-à-soi

un œil vers la base arrière

à mi-pente vous et moi

nous ne ferons pas la paire

 

pas non plus le mauvais choix

que les autres ont pu faire

jamais ni ménage à trois

ni migraine imaginaire

 

depuis nos pays jumeaux

nous échangerons des mots

à ne pas prendre à la lettre

 

vous me direz bel ami

et certain de ne pas l’être

je vous répondrai promis

 

paru dans le n° 32 (janvier 2025) de la revue en ligne SQUEEZE


 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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