l'âge de plume

 

changer d’espace

courir au moins pressé

ne plus penser

qu’à la beauté qui passe

 

qu’à la beauté

qui passe ou qui demeure

à la même heure

mais de l’autre côté

 

tourner la page

ni chêne ni roseau

être l’oiseau

sans raison ni partage

 

voler cent ans

mille ans mais vers cette île

où l’inutile

est l’unité de temps

 

jeter l’enclume

et jeter le boulet

ne plus rouler

que le vent sous la plume

 

et vivre enfin

comme on rêvait de vivre

avec un livre

à l’ombre d’un parfum

anna 2.0

 

train pourri pour paris

quinze ans peut-être seize

mon cœur sous le ciel gris

mon cul entre deux chaises

 

tout ça n’existe plus

pernety montparnasse

nos corps à corps perdus

n’ont pas laissé de trace

 

aujourd’hui d’autres gens

s’y croisent en cherchant

l’âme sœur et sans doute

 

certains sont amoureux

je suis navré pour eux

mais ça comme ils s’en foutent

nomade's land

 

traversée du désir

avec en moi ce doute

à ne pouvoir choisir

ni l’arbre ni la route

 

et balancer toujours

au bord de son visage

dans l’étendue des jours

oasis ou mirage

 

avancer revenir

le passé l’avenir

tout se brouille et s’emmêle

 

en arrière en avant

mon amour est comme elle

inlassable et mouvant

tribal transit

 

pendant qu’il était endormi

pendant que tout était tranquille

la neige a semé son tapis

de plumes blanches sur la ville

 

mais sapiens a rouvert les yeux

sapiens a sorti sa bagnole

dansant la danse des essieux

dans les gargouillis du gazole

 

tout était frais tout était beau

en deux coups de cuillère à pot

de nouveau tout est dégueulasse

 

et c’est ainsi depuis mille ans

depuis l’aube et la nuit des temps

il bouge et tout se change en chiasse

la visite

 

je me souviens voisine

quand vous veniez chez nous

croiser à la cuisine

vos mains sur vos genoux

 

oh vous n’étiez pas dupe

malgré vos airs pincés

tirant sur votre jupe

tout juste pas assez

 

moi je vous trouvais belle

en ce temps-là si belle

tous mes jouets d’alors

 

et tous ceux de mon frère

j’aurais donné tout l’or

du monde pour vous plaire

jours d'après

 

on m’a collé sur la figure

le masque bleu des confinés

mais la ville est un peu plus sûre

je peux sortir le bout du nez

 

aller m’installer en terrasse

en attendant les attentats

revoir passer l’ami bidasse

vigipirate et mardi gras

 

ne plus songer à la dépense

profiter de l’état d’urgences

dans les recoins du CHU

 

me goinfrer d’amours impubères

et de tendresses policières

avant putain qu’on n’en ait plus

variable aléatoire

 

dans le vacarme idiot

des chairs qui se dépensent

cherchons-nous un écho

à nos propres silences

 

sinon que cherchons-nous

dans le ventre des autres

un malaise un dégoût

qui ne soit pas le nôtre

 

que cherchons-nous sans fin

dans ces corps incertains

dans tous ces corps qui passent

 

aveuglés à genoux

dans ce palais des glaces

bon sang que cherchons-nous

poulailler

 

on s’est fait tabasser

chez lacrymo matraque

mais c’était pas assez

ma bonne tête à claques

 

on s’est fait canarder

encore et de plus belle

au bal des LBD

mon œil qui bat de l’aile

 

putain regardez-les

tous ces poux ces poulets

nourris pour la castagne

 

entendez-les glousser

dans les ébats télé

de la france qui gagne

photo souvenir

 

mes yeux s’attardent sur des fesses

terribles de proximité

le cours de l’autre est à la baisse

je suis malade et c’est l’été

 

l’été des danses animales

des chairs au charme lancinant

ce soir la france est en finale

et je m’en moque éperdument

 

mettre des mots sur un visage

un corps de femme entre deux âges

sur un désir toujours déçu

 

de page blanche en page blanche

j’aurai passé tout mon dimanche

à regarder glander des culs

noces de vent

 

dix ans déjà dix ans ce soir

de souvenir de nostalgie

dix ans d’absence et dans le noir

la même flamme ressurgie

 

dix ans déjà dix ans demain

de quotidien sans importance

dix ans laissés sur ce chemin

tout droit de neige et de silence

 

dix ans déjà dix ans d’exil

ainsi qu’à moi vous souvient-il

de tous les fils de notre histoire

 

dix ans déjà mais c’est si peu

lorsque l’on aime et que l’on peut

vivre de mots et de mémoire

mascarade

 

pas de tambour pas de trompette

pas non plus de chapeau pointu

rien à se mettre sur la tête

des fantaisies qu’en ferais-tu

 

pas plus de farce que d’attrape

de serpentin de mirliton

le jour est long alors on zappe

des confettis qu’en ferait-on

 

geste train-train garde barrière

en attendant le couvre-feu

chenillons à la queue leu leu

 

et si demain c’est cimetière

au moins le masque sur le nez

nous dormirons bien confinés

no virus found

 

comme j’aimais ton corps

quand tu dansais fragile

quand plus rien au dehors

ne suggérait la ville

 

quand tu dansais pour moi

charnelle et magnifique

la plus lente qui soit

des danses de l’afrique

 

quand je sentais ta peau

s’ouvrir sous le manteau

de nos matins hybrides

 

comme j’aimais alors

entrelacer ton corps

dans mes cristaux liquides

belle au bois dormant

 

je suis entré chez vous

la porte était ouverte

vous dormiez dormiez-vous

seule et si peu couverte

 

j’ai caressé des yeux

du bout des doigts sans doute

votre corps silencieux

étendu sur ma route

 

je me suis enhardi

vous ne m’avez rien dit

et pour jamais j’ignore

 

s’il vous était aisé

de me laisser penser

que vous dormiez encore

chant trisomique

(opus 21)

 

tu nous as faits à ton image

et pour ce geste judicieux

seigneur nous te rendons hommage

gloire à toi au plus haut des cieux

 

la flamme éternelle et divine

tu nous l’as mise au fond des yeux

en nous voyant l’on te devine

gloire à toi au plus haut des cieux

 

seigneur ta volonté soit faite

et que ce jour soit jour de fête

où dieu reconnaîtra les siens

 

ainsi chantait l’autre dimanche

cierge fondant et robe blanche

le chœur joyeux des mongoliens

carte postale

 

juillet la viande est en vacances

dans son maillot de chez sumo

au rayon modes et tendances

le boudin blanc est en promo

 

amas de mous et de mamelles

monceaux de tripes avachis

tout ça se vautre pêle-mêle

gavé de farce et de hachis

 

et tout ça suinte sur la plage

en attendant l’équarrissage

ou la remballe du mois d’août

 

la chair excite chez la femme

un peu moins chez l’hippopotame

je pense à vous bisous partout